Mother-infant relationships in wild Guinea baboons (Papio papio)

Abstract

Pendant l’enfance, les primates sont absolument dépendants de leur mère pour l'allaitement, le transport et la thermorégulation, mais ils bénéficient également de l'association avec leur mère pour la protection et le soutien social. De plus, la mère sert de modèle pour l'apprentissage social, facilite l'interaction avec l'environnement physique et l'intégration dans un réseau social plus large. Les interactions répétées et la réciprocité entre la mère et l’enfant, ainsi que le temps qu'ils passent ensemble, conduisent à la formation du lien mère-enfant, qui est généralement reconnu comme le lien social le plus fort dans la vie des primates. La relation entre les mères et les enfants est dynamique, et ils passent généralement la plupart du temps en contact et en proximité immédiate juste après la naissance des enfants, et les mères allaitent et portent fréquemment leurs enfants, mais assez rapidement, le temps de contact, de portage et d'allaitement diminue progressivement, et la proximité augmente à mesure que la mère et l’enfant avancent dans l’enfance. Le sevrage est une période typiquement marquée par des comportements de rejet maternel et d'augmentation de la distance entre la mère et l’enfant favorisés par la mère. À la fin de l’enfance, les individus sont indépendants de leur mère et sont donc capables de se déplacer et de se nourrir seuls. Même si la dépendance entre la mère et l’enfant diminue au fur et à mesure que l’enfance avance, toutes les mères ne se comportent pas de la même manière envers leurs enfants. La variation individuelle des soins maternels est connue sous le nom de style de maternage, et elle peut avoir des différences marquées dans le sort du développement et de la survie des enfants. En général, les mères qui sont plus protectrices produisent des enfants qui ont un taux de survie plus élevé et qui grandissent plus vite, tandis que les enfants de mères qui rejettent ont un taux de survie plus faible et grandissent plus lentement, mais atteignent l'indépendance plus tôt. L'objectif de cette thèse était d'étudier les relations mère-enfant chez les babouins de Guinée sauvages vivant dans le parc national du Niokolo-Koba au Sénégal. Les babouins de Guinée vivent dans une organisation sociale à plusieurs niveaux, avec des "unités" à leur base, plusieurs unités formant des "partis", et plusieurs partis se regroupant pour former des "gangs". Les babouins de Guinée forment des liens sociaux forts avec les autres mâles, ont de faibles niveaux d'agressivité et montrent une grande tolérance spatiale. La dispersion se fait par les femelles, et même si les femelles forment des hiérarchies de dominance linéaires et abruptes au niveau de l'unité, le rang ne dépend pas de la parenté. En raison du transfert des femelles vers d'autres unités, partis ou gangs, la progéniture peut être abandonnée si la mère décide de se disperser. Tous ces éléments, ainsi que le fait que les babouins de Guinée vivent dans un système social tolérant en ce qui concerne leurs relations sociales, font des babouins de Guinée une espèce intéressante pour étudier les relations mère-enfant. Dans le chapitre 2, je fournis une description des comportements entre les mères et les enfants tout au long de l’enfance. Je montre que, comme chez tous les primates, les mères et les enfants passent la plupart de leur temps en contact et en proximité dans les premiers stades de l’enfance, et que ces comportements, ainsi que le portage et le contact des tétines, diminuent avec le temps. D'autres comportements, en revanche, sont très rares chez les babouins de Guinée, comme la protection et le rejet, y compris le contact avec la tétine et le rejet du portage. Je caractérise le style de maternage des babouins de Guinée, qui peut être considéré comme permissif, puisque la gamme protection-rejet n'est pas prononcée, et reflète globalement leur style social tolérant. Je calcule la croissance des enfants à partir des données de la photogrammétrie laser parallèle, et je montre que, contrairement à d'autres études, le style de maternage et la parité n'ont pas d'effet évident sur la croissance et la survie des enfants. Je mets ensuite en perspective les résultats obtenus en les comparant avec ceux des babouins jaunes, une espèce vivant dans une société multi-mâle et multi-femelle avec une philopatrie féminine, des matrilignes claires et des styles de maternage beaucoup plus prononcés. J'examine ensuite les résultats de manière critique en soulignant les effets possibles de la rareté des données et les problèmes méthodologiques dérivés de la photogrammétrie laser parallèle. Dans le chapitre 2, je développe un nouveau cadre statistique pour tenir compte du manque d'homogénéité dans les données, ce qui n'est pas rare lors de l'étude des animaux sauvages, et dont mon projet a été sévèrement affecté par la pandémie de COVID-19. De plus, cette approche statistique permet de contrôler l'âge de l’enfant, ce qui est primordial lorsqu'on étudie l'ontogenèse. Dans le chapitre 3, je rapporte les 13 cas de comportements post-mortem qui ont été observés envers des enfants dans notre population de babouins de Guinée pendant 9 ans. La plupart de ces comportements ont été réalisés par les mères des enfants, mais aussi occasionnellement par d'autres femelles. Conformément aux rapports d'autres études, des comportements de portage, de protection et de toilettage ont été observés, mais aussi de cannibalisme. Je discute nos observations en considérant les hypothèses qui ont été proposées jusqu'à présent pour expliquer l'occurrence des comportements post-mortem, et j'évalue ces hypothèses de manière critique. J'affirme que l'hypothèse de la gestion du deuil n'est pas testable et je propose que la sélection a favorisé les comportements post-mortem de prise en charge excessive afin d'éviter une erreur de type II dans l'abandon d'un enfant qui ne réagit pas. Je suggère également que l'affaiblissement du lien mère-enfant conduit à l'abandon du cadavre, et que le cannibalisme observé indique que l’enfant mort est finalement considéré comme de la nourriture. Cette thèse fournit la première étude sur les relations mère-enfant chez les babouins de Guinée sauvages jusqu'à présent. Dans cette thèse, j'ai mis en lumière la dynamique des comportements entre les mères et les enfants, caractérisé les styles de maternage, et évalué l'effet des styles de maternage différentiels sur le sort des enfants. J'ai également contribué à démêler les mécanismes sous-jacents derrière l'apparition de comportements post-mortem et de cannibalisme chez les babouins de Guinée, et chez les primates non-humains en général.